RIS à Bruxelles et en Wallonie, la réalité derrière les chiffres

Oct 15, 2018

En 2016, le taux de recours au revenu d’intégration sociale s’élevait à plus de 5 % à Bruxelles et à près de 3 % en Wallonie, contre moins de 1 % en Flandre.
En cause : l’importante pauvreté urbaine et la désindustrialisation qui a surtout frappé le sud de notre pays.

Les Bruxellois et les Wallons sont beaucoup plus nombreux que les Flamands à recourir à l’assistance sociale.
Les chiffres le prouvent. En 2016, la moyenne mensuelle du taux de revenu d’intégration sociale (RIS) s’élevait à 5,31 % à Bruxelles et à 2,89 % en Wallonie, contre seulement 0,89 % en Flandre. Mais faut-il s’arrêter là sans prêter attention aux réalités cachées derrière ces statistiques ?
Selon François Ghesquière, sociologue à l’Institut wallon de l’Évaluation, de la Prospective et de la Statistique (IWEPS), ces chiffres sont dus à des raisons à la fois géographiques et historiques. Bruxelles est une région exclusivement urbaine. Or, en Belgique, les villes sont les zones les plus touchées par la pauvreté.
« Historiquement, les classes populaires ont majoritairement vécu dans les centres-villes. Les raisons sont diverses. Par exemple, dans les villes, les logements sont plus nombreux et il ne faut pas nécessairement s’acheter un véhicule pour se déplacer », explique François Ghesquière. La Région wallonne, quant à elle, comprenait de nombreuses industries lourdes, principalement dans le sillon Sambre-et-Meuse.
« La Wallonie a donc été plus durement touchée que la Flandre par la désindustrialisation. De nombreux travailleurs wallons ont perdu leur emploi. » Ceci explique donc un taux d’emploi plus bas et un taux de chômage plus élevé en Région wallonne.
« Il est normal que l’assistance soit plus développée là où les besoins sont plus importants, là où la pauvreté est plus répandue », soutient François Ghesquière.

Un taux qui s’intensifie

Ces dernières années, le taux de RIS a augmenté à Bruxelles et en Wallonie, légèrement depuis 2008 et radicalement depuis 2015. En cause : la crise financière de 2007-2008 et la réforme de la sécurité sociale de 2015, qui limite désormais dans le temps les allocations d’insertion (nouvelle dénomination des allocations d’attente).
Ces deux événements n’ont fait qu’augmenter le recours à l’assistance sociale dans les régions déjà fortement touchées par le manque d’emplois. Pour rappel, les allocations d’insertion sont destinées aux jeunes arrivant sur le marché du travail. Auparavant, ces dernières étaient attribuées, à durée indéterminée, aux demandeurs d’emploi âgés de moins de 30 ans (au moment de la demande) et n’ayant pas accès aux allocations de chômage sur base de travail après un an de recherche.

Depuis 2015, la limite d’âge est fixée à 25 ans et le jeune ne peut percevoir ces allocations que pendant une durée de trois ans. Les demandeurs d’emploi plus âgés ou n’ayant pas décroché un emploi stable après trois années de recherche se retrouvent donc à devoir demander le RIS.

Les nouvelles générations également touchées

Les nouvelles générations sont souvent prises dans l’engrenage de leurs parents.
« Un enfant de père sans emploi a 16 fois plus de risques de devenir sans emploi qu’un enfant de cadre supérieur », affirme François Ghesquière.
« Différentes études ont été réalisées. Cette propension est due aux ressources économiques et culturelles. Des parents aisés peuvent aider financièrement leurs enfants (payer des études, acheter une maison, lancer une entreprise…) et ont souvent eux-mêmes suivi des études. Ils vont donc les orienter vers une école de meilleure qualité, les aider à faire leurs devoirs, leur payer des professeurs particuliers, les pousser à s’inscrire à des études supérieures…
À l’inverse, si vos parents sont peu aisés, ils ne pourront pas financer vos études. Et ils n’ont peut-être pas eu la chance d’étudier eux-mêmes. Par conséquent, ils risquent d’éprouver des difficultés à vous aider dans vos devoirs. Les relations jouent également. Si un membre de votre famille dirige une entreprise, il pourra plus facilement vous aider à décrocher un emploi.
 »

Les Wallons pas plus fainéants que les Flamands

Il faut savoir que le chômage varie très fort au fil du temps. « Par exemple, il a augmenté fortement dans les années 70, à la suite de la crise. Les gens ne sont pas tout à coup devenus fainéants à ce moment-là. Il n’y a pas eu une épidémie de fainéantise. La raison n’est pas culturelle, mais bien historique et structurelle. Il a d’ailleurs été démontré que les travailleurs wallons se déplacent plus loin que les travailleurs flamands pour travailler. »

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